Salomé, grimpeuse lyonnaise, vous propose de découvrir les Calanques autrement, sans voiture. Une aventure qu’elle a mené aux côtés d’Ambroise, son compagnon. Elle nous raconte tout cela dans un récit mêlant conseils pratiques et émerveillement, tout en montrant que cet endroit, accessible en train depuis Lyon, est un véritable terrain de jeu pour les amateurs de grandes voies. Et qui sait, peut-être que son expérience vous inspirera à allier escapade en train et escalade.
D’où vous est venue l’idée de ce trip dans les Calanques ?
On avait déjà eu un bel aperçu des Calanques lors d’un week-end d’initiation à la grande voie avec le CAF. On avait dormi à Cassis, et un jour, on avait décidé de partir grimper à En-Vau à pied, en laissant les voitures derrière nous. Et c’était hyper chouette ! Le départ se faisait depuis le centre-ville, et cette approche à pied s’était révélée aussi simple qu’agréable. On en avait gardé un très bon souvenir.
Alors, quand on a commencé à penser à une nouvelle sortie, le choix des Calanques s’est imposé naturellement. D’abord parce que c’est un coin sublime, mais aussi parce que c’est facile d’accès en train depuis Lyon. D’autant que l’on avait envie de voir la mer ! Janvier, c’est une période parfaite pour grimper là-bas : pas trop de monde, une lumière magnifique, et des températures agréables !
On savait qu’avec le train, on devait réserver à l’avance. Forcément, ça laissait moins de place à l’improvisation. Mais on s’était dit que, même si la météo tournait mal et qu’on ne pouvait pas grimper, ce ne serait pas perdu : on en profiterait pour aller se balader dans Marseille. Bref, quoi qu’il arrive, on allait passer un bon moment.
Pourquoi avoir choisi de tout faire sans voiture ?
En mai dernier, notre voiture est tombée en panne… et on n’a pas eu envie d’en racheter une. Ce choix, un peu par défaut au départ, est vite devenu une vraie occasion d’explorer d’autres manières de se déplacer. On avait déjà expérimenté le combo vélo-grimpe, et cette fois, on s’est dit : pourquoi ne pas tester le train-pied-grimpe ?
C’était aussi une manière d’embrasser un autre rythme. Prendre le temps de marcher jusqu’à la voie, d’entrer dans le paysage au fur et à mesure, de sentir les choses se mettre en place lentement. Il y a une forme de cohérence, presque de poésie, à se rendre à pied sur un site d’escalade.
Et puis, on avait moins de jours devant nous que pour une virée d’été. Le train s’est imposé comme une alternative plus rapide que le vélo, mais tout aussi enthousiasmante.



Comment vous êtes-vous organisés ?
Jour 1. Départ à 09h06 de Lyon. Le train file rapidement, et à 10h50, nous voilà arrivés à Marseille. Un petit transfert en TER (de 23 minutes), puis 20 minutes de bus, de la gare au centre-ville. C’est un début de voyage parfait : on se pose au soleil pour déjeuner à Marseille, avant de flâner dans les rues et de savourer l’atmosphère de la ville. Ce premier jour est une parenthèse, un avant-goût des vacances.
Jour 2. La première journée d’escalade commence sur les falaises de Castelviel. On part du centre-ville de Cassis, et après environ 2h-2h30 de marche d’approche, on arrive enfin à la paroi. On attaque Les Dents de la Mer, une voie splendide. La paroi est très verticale, et la vue sur la mer est juste incroyable. On est quasiment seuls sur la face, et sous le soleil éclatant, c’est un véritable paradis. L’escalade est intense, mais l’environnement est tellement magique qu’on oublie la fatigue.
Jour 3. Direction Cap Canaille pour la journée. On part du centre-ville, cette fois pour une marche d’approche un peu plus courte, environ 1h30. On grimpe sur la voie Bourreur de Rousse. L’ambiance est absolument impressionnante, un peu comme dans le Wadi Rum, en Jordanie, avec des falaises rouges et une immensité à couper le souffle. Ce jour-là, la falaise est pleine de grimpeurs, et il y a aussi pas mal de touristes au sommet. On s’est fait des copains de grimpe au relais. On a fini la journée à dîner ensemble le soir. Le fait de venir à pied crée tout de suite des liens, et la conversation s’engage naturellement.
Jour 4. La météo, malheureusement, ne nous permet pas de grimper. Le vent souffle fort, avec des rafales impressionnantes. On décide donc de retourner à Marseille. Ce n’est pas un échec, bien au contraire. On en profite pour visiter le MUCEM. Le retour se fait en toute tranquillité, et à 20h12, nous prenons le train pour Lyon.
Y a-t-il eu des moments où vous avez regretté d’être partis sans voiture ?
On n’a pas regretté une seconde d’avoir laissé la voiture de côté. C’est vrai, avec une voiture, on aurait probablement pu grimper dès le premier jour, ou filer vers une falaise plus abritée quand le vent s’est levé. Mais au final, c’était aussi agréable de se laisser porter par un autre rythme. Profiter autrement. On a pris le temps de bien manger, de s’offrir un bon resto, d’aller voir une expo au musée.
Quelles grandes voies avez-vous choisies ?
Pour choisir nos grandes voies, on s’est surtout laissés porter par l’envie de grimper, plus que par les temps de marche. On a visé les faces sud, histoire de profiter au maximum du soleil d’hiver. Ambroise n’avait encore jamais grimpé à Castelviel, et j’avais très envie de lui faire découvrir le secteur. Dans Les Dents de la Mer, on s’est offert une pause goûter sur une vire, seuls au monde, écrasés de soleil, avec la mer pour décor. C’était un moment suspendu. Ambroise a eu un vrai coup de cœur pour la dernière longueur, fine et aérienne, avec le vide sous les pieds. Moi, j’avais mal aux pieds à ce moment-là, alors j’ai davantage savouré les longueurs précédentes.
Le lendemain, sur Bourreur de Rousse, on a un peu plus bataillé. Dès la première longueur, je me suis trompée de relais. On a dû en bricoler un un peu plus haut pour éviter un tirage infernal… mais ça ne nous a pas épargné un énorme sac de nœuds. Premier vrai gros sac de nouilles de notre cordée : 45 minutes à détricoter le chantier.
Qu’avez-vous mis dans votre sac ?
Les cordes, la frontale, les casques, les baudriers, les dégaines, les chaussons d’escalade : le strict nécessaire pour grimper en grande voie. On a glissé chacun un pantalon de grimpe, deux tee-shirts, un petit sac pour emporter le minimum sur la voie. Et puis, on a aussi pris le temps d’ajouter l’appareil photo argentique et un livre chacun.
Quel a été votre moment préféré (en dehors de l’escalade) ?
Les marches d’approche, parfois longues, ont aussi participé à la beauté du voyage. Traverser la calanque à pied, dans la lumière dorée du matin ou celle plus douce du soir, c’était déjà une aventure en soi. Après notre grande voie à Castelviel, je me suis baignée à En-Vau. C’était une sensation de liberté totale, un vrai luxe.
À Cap Canaille, on a rencontré deux autres grimpeurs au relais. Comme il y avait un peu d’attente, on a discuté, plaisanté, partagé des anecdotes suspendus à mi-paroi. Le courant est bien passé, et le soir, on s’est retrouvés pour boire un verre, puis on a enchaîné sur un dîner improvisé. C’était simple, spontané, et vraiment sympa. Ce genre de rencontres, elles arrivent plus facilement quand on vient à pied, sans être pressés, ouverts à ce que la journée peut apporter.
Avez-vous d’autres projets du même genre en tête ?
Pour notre prochain projet grimpe, on avait envie de faire Lyon-Céüse pour nos vacances d’été, mais plutôt à vélo. Et évidemment, on se garde l’option train pour quand on aura un peu de temps, mais pas trop.